Apologie du terrorisme en ligne : Réseaux sociaux et liberté d’expression
L’apologie du terrorisme (toute justification ou glorification d’un acte de terrorisme) est un délit prévue à l’article L.421-2-5 du Code Pénal puni de cinq ans d’emprisonnement et de 75.000 Euros d’amende. Une circonstance aggravante est prévue au deuxième alinéa de ce texte si l’infraction résulte de la publication de posts sur les réseaux sociaux (Facebook, Instagram, Twitter etc..). Cette circonstance aggravante porte les peines maximales à sept ans d’emprisonnement et 100.000 Euros d’amende
Qu’en est-il des posts ou des vidéos diffusés sur les réseaux sociaux ?
Ce délit est au cœur de l’actualité suite au placement en garde à vue le 9 novembre 2023 de l’influenceuse Warda ANWAR conséquence d’une vidéo postée sur Instagram dans laquelle elle tient les propos suivants : « L’histoire du bébé qui a été mis dans le four, je me pose la question s’ils ont mis du sel, du poivre… S’ils ont mis du thym? » faisant référence aux massacres commis par le groupe terroriste du Hamas sur des citoyens civils israélien le 7 octobre 2023.
La Justice se prononcera le 22 novembre prochain sur une éventuelle condamnation de Warda ANWAR pour apologie du terrorisme commis sur un service de communication en ligne.
une liberté totale éphémére ?
Cet exemple invite à s’interroger sur le sentiment de liberté totale des contenus publiés en ligne ressenti par les utilisateurs de réseaux sociaux.
En effet, la popularité grandissante des réseaux sociaux sur cette dernière décennie conjuguée au temps nécessaires à l’appareil législatif des différents états pour rattraper cette croissance rapide et instaurer un cadre réglementaire, ont entrainé le développement d’un faux sentiment d’impunité chez les utilisateurs des plateformes sociales. Ce qui n’est plus le cas à l’heure actuelle, les gouvernements prenant aux sérieux les dangers liés à la publication de certains contenus sur le web.
L’encadrement en place actuellement est à deux niveaux, d’une part un cadre légale instaurant des obligations pour les utilisateurs par la mise en place d’une réglementation adaptée (Loi sur le cyber harcèlement, l’article susmentionné relatif à l’apologie du terrorisme etc..) et d’un outil de signalement dédié la plateforme Pharos et d’autre part l’instauration d’obligation pour les plateformes par l’entrée en vigueur du Règlement Européen sur les Services Numériques (DAS) depuis le 25 août 2023.
Pour ce qui est des obligations incombant aux utilisateurs, il est important de garder en mémoire que d’un point de vue purement légale, le principe est le suivant :
tout ce qui est interdit hors ligne l’est également en ligne.
Dès lors, l’ensemble des lois et règlements applicables au quotidien le sont également en ligne et notamment sur les plateformes de réseaux sociaux.
Les utilisateurs sont donc tenus de s’assurer que les contenus qu’ils publient respectent les réglementations nationales.
Ainsi peuvent également faire l’objet de procédure les publications qui pourraient s’assimiler à de la concurrence déloyale, de la diffamation, la reproduction de contenu sans identifié le créateur original ou tout autre comportement répréhensible « hors-ligne ».
Une lutte renforcée des infractions en ligne
Les évolutions légales de ces dernières années ne sont donc pas centrées sur la mise en place de nouvelles infractions, mais sur la mise en place de nouveaux moyens de luttes et de contrôle ou encore par le durcissement des sanctions lorsque les infractions sont commises en ligne.
Parmi ces évolutions, nous pouvons citer la mise en place d’une majorité numérique fixée à 15 ans par la loi du 7 juillet 2023, interdisant l’accès des mineurs aux réseaux sociaux en l’absence d’autorisation parentale, ou encore la mise en place de la plateforme Pharos qui a comptabilisé 91.221 signalements au premier semestre 2023.
Ce nombre important qui ne rassemble surement pas l’ensemble des comportements répréhensible s’explique par la structure même d’internet qui veut que le signalement initial aux autorités se fasse de manière volontaire par les utilisateurs, ce qui n’est pas toujours le cas.
Afin de palier à cette faille, les autorités gouvernementales nationales et européennes ont décidé d’alourdir les obligations de contrôle des plateformes de réseaux sociaux afin que ces dernières supportent le poids du contrôle des contenus publiés sur leur plateforme sous peine d’amende administrative. Ces obligations sont notamment mises en place par la loi précitée du 7 juillet 2023 dont le décret d’application n’est pas encore paru à ce jour et par le Règlement Européen sur les Services Numériques (DAS) entré en vigueur depuis le 25 août 2023.
Les publications en ligne sur les réseaux sociaux semblent être dans le collimateur des gouvernements, il est donc recommandé aux utilisateurs de maitriser le contenu qu’ils choisissent de publier sur leur plateforme et ce d’autant plus lorsque ces utilisateurs disposent d’une base d’abonnés conséquente et que leur contenu est en libre accès.
Compte tenu des fortes amendes que risquent les plateformes de réseaux sociaux en cas de non-conformité au DAS, il convient de s’interroger sur la manière dont seront mis en place ces nouveaux systèmes de contrôle et les sanctions qu’appliqueront les plateformes (suspension des comptes, suppression des contenus dans l’attente de vérification etc…).
Il sera également important de garder un œil sur un éventuel usage pernicieux de ces nouvelles règles par le signalement de contenus sans fondement dans le seul but de nuire à certains usagers des plateformes créateurs de contenu. Notamment, dans le cadre du respect des règles de la propriété intellectuelle les plateformes seront-elles juges, jury et exécutant dans le maintient ou la suppression de contenu en ligne litigieux ?
Reste à voir également la sévérité dont fera preuve la justice dans l’application des réglementations nationales et européennes à l’égard des plateformes en ligne…
Avocat - Maître Bueder
Passionné par mon métier et le sport, je punch aussi bien du gauche que du droit ! Retrouvez tous mes articles techniques et de vulgarisation pour bien comprendre le droit des sociétés et des marques
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