PLF 2026 menace Exit Tax

Exit tax (article 167 bis du cgi) et PLF 2026 – séisme fiscal sur votre projet d’expatriation

Entreprendre à l’étranger représente un rêve de liberté, mais pour l’entrepreneur, le départ s’accompagne d’une contrainte fiscale majeure : l’Exit Tax. Cette taxation n’est pas une simple amende sur votre valise ; elle est une imposition immédiate des plus-values latentes que vous avez accumulées sur vos titres et actions en France. Vous devez donc sécuriser votre expatriation tout en évitant que la France ne taxe ces plus-values au moment où vous vous engagez dans un nouveau projet de vie. Le paysage juridique de ce dispositif est aujourd’hui en pleine mutation.

La simplicité actuelle du dégrèvement (un délai de 2 ou 5 ans seulement) est menacée par le Projet de Loi de Finances (PLF) pour 2026, qui pourrait réintroduire un délai de conservation des titres de 15 ans. Vous devez donc comprendre non seulement les règles actuelles, mais surtout anticiper la loi qui s’appliquera au moment précis de votre départ pour transformer cette contrainte en une stratégie d’optimisation maîtrisée.

Comprenez d’abord : l’exit tax, le piège de la plus-value latente

Qu’est-ce que l’exit tax ? vous devez saisir le concept d’impôt différé.

Vous êtes un entrepreneur, vous avez bâti votre société en France, vous avez créé de la valeur. Aujourd’hui, votre projet de vie vous conduit à vous installer par exemple en Espagne. Félicitations, mais avant de boucler vos cartons, vous devez maîtriser un concept fiscal français fondamental : l’Exit Tax. Ce dispositif n’est pas une taxe sur votre déménagement, mais sur le fruit de votre travail non encore encaissé.

L’Exit Tax, traité par l’article 167 bis du CGI, est en réalité l’imposition différée des plus-values latentes. Expliquons nous simplement. Lorsque vous quittez la France, l’administration fiscale considère que vos titres sociaux, vos actions, et autres valeurs mobilières sont cédés fictivement à leur valeur de marché. Si cette valeur de marché est supérieure à votre prix d’acquisition, vous réalisez une plus-value… latente.

L’impôt est donc calculé à ce moment-là. Pourquoi ? Parce que la France veut éviter que vous ne vous installiez en Espagne pour bénéficier d’une fiscalité potentiellement plus douce, avant de vendre vos titres le lendemain. Vous devez donc déclarer cette plus-value à la France avant de partir, sécurisant ainsi l’assiette fiscale française sur les gains que vous avez réalisés pendant votre période de résidence en France.

Mais attention, vous n’êtes pas toujours concerné par ce dispositif. L’Exit Tax vise uniquement les contribuables qui détiennent un patrimoine significatif et qui ont été domiciliés fiscalement en France pendant au moins six ans au cours des dix années précédant le départ. Ensuite, vous devez vérifier que vous franchissez l’un des deux seuils suivants :

soit la valeur totale de vos titres est supérieure à 800 000 euros, soit vous détenez une participation d’au moins 50 % des bénéfices sociaux, quelle que soit la valeur. Si vous êtes un dirigeant ou un actionnaire significatif de PME, vous entrez très probablement dans ce périmètre.

Nous allons voir comment, une fois ce seuil franchi, vous pouvez heureusement demander le sursis de paiement qui, si vous partez en Espagne, sera votre première ligne de défense.

Comment fonctionne le sursis de paiement de plein droit ?

Face à l’imposition théorique de l’Exit Tax, le sursis de paiement est votre solution immédiate et pratique. Vous devez comprendre que lorsque vous quittez la France pour vous installer dans un État de l’Union Européenne comme l’Espagne, l’impôt sur vos plus-values n’est pas effacé, mais simplement mis en attente. C’est un sursis de paiement de plein droit, garanti par le droit européen : l’administration française ne peut pas exiger de garanties ou de paiement immédiat pour un tel départ. Ce mécanisme vous offre une bouffée d’air frais et la certitude de ne pas devoir liquider des actifs pour payer une taxe fictive au moment de votre départ.

Cependant, cette facilité n’est pas une liberté totale. Vous devez vous souvenir que la France n’oublie jamais sa créance potentielle. Pour maintenir ce sursis, vous devez remplir une obligation déclarative annuelle rigoureuse. Chaque année, vous déposez le formulaire spécifique (le n°2074-ETSL) auprès du service des impôts des non-résidents.

Sachez-le bien : le non-respect, même par simple oubli, de cette formalité administrative pendant trois années consécutives peut entraîner la déchéance du sursis. Dans ce cas, l’administration peut alors vous réclamer l’intégralité de l’Exit Tax en jeu, transformant votre bouclier en une cible fiscale immédiate. Vous devez donc faire preuve d’une discipline de fer dans ce suivi pour que votre bouclier fiscal reste effectif.

Le cas des pays tiers : un sursis de paiement sous caution

Le régime du sursis de paiement que vous offre l’Espagne, en tant que pays membre de l’Union Européenne (UE), est un confort que vous ne retrouverez pas en vous expatriant dans un État Tiers (hors UE ou Espace Économique Européen – EEE). Dans ce scénario, le rôle du sursis change radicalement et devient conditionné.

Premièrement, pour bénéficier du sursis de paiement, vous ne l’obtenez plus de plein droit ; vous devez en faire la demande expresse à l’administration fiscale française, ce qui initie une procédure plus lourde. Deuxièmement, et c’est le point de friction majeur, l’administration fiscale exigera la constitution de garanties pour couvrir le montant de l’Exit Tax potentiellement dû.

Ces garanties prennent généralement la forme de nantissement de comptes bancaires, de titres ou d’hypothèque, immobilisant de fait une partie de votre patrimoine. Le paiement de l’impôt est suspendu, certes, mais votre capacité à disposer librement de vos biens est sévèrement entravée.

Par conséquent, si votre choix se portait sur un pays comme la Suisse, le Royaume-Uni (post-Brexit) ou Dubaï, la nature de l’Exit Tax basculerait d’une simple obligation déclarative annuelle vers une véritable contrainte patrimoniale immédiate. Vous troquez la facilité administrative contre l’obligation de « geler » une partie de vos actifs, ce qui est souvent incompatible avec l’agilité et la liquidité recherchées par un entrepreneur en phase d’expatriation.

Les règles actuelles

Dégrèvement automatique : effacez la dette par la conservation.

Aujourd’hui, avant l’entrée en vigueur de la Loi de Finances pour 2026, l’Exit Tax reste un dispositif gérable grâce au mécanisme de dégrèvement. Le principe est simple : en conservant vos titres sans les céder après votre départ, vous prouvez que l’expatriation n’était pas un montage fiscal visant à échapper à l’impôt sur la plus-value. C’est pourquoi, pour tout transfert de domicile fiscal effectué avant le 1er janvier 2026, vous bénéficiez du régime assoupli issu de la Loi de Finances 2019. Ce régime réduit drastiquement la durée de votre assujettissement.

Concrètement, la durée de conservation pour obtenir l’annulation totale de la dette d’Exit Tax est fixée à deux ou cinq ans, selon la valeur de vos titres. Vous vous affranchissez de l’impôt en deux ans si la valeur globale de vos titres est inférieure à un certain seuil, ou en cinq ans au-delà. Cette période courte vous offre une visibilité et une liquidité rapides sur votre patrimoine. De plus, sachez que la dette peut être effacée automatiquement si vous choisissez de revenir en France avant la fin de ce délai et que vous détenez toujours les titres. C’est une soupape de sécurité essentielle pour tout entrepreneur dont les plans de vie peuvent évoluer.

La cession anticipée : utilisez l’imputation de l’impôt espagnol.

L’Exit Tax n’est pas un impôt qui vous interdit de gérer votre patrimoine, mais il vous impose de la prudence. Si, pour une raison stratégique ou une opportunité de marché, vous décidez de céder vos titres en Espagne avant la fin de la période de deux ou cinq ans vous mettez fin au sursis de paiement. L’impôt théorique français devient alors immédiatement exigible.

Toutefois, ce mécanisme est tempéré par un principe fondamental : l’interdiction de la double imposition. Lorsque vous cédez vos titres, l’Espagne, en tant que pays de résidence, percevra un impôt sur la plus-value réelle réalisée depuis votre départ.

La bonne nouvelle, c’est que la France vous autorise à imputer l’impôt effectivement payé en Espagne sur le montant de l’Exit Tax due en France. En clair, l’Exit Tax ne sert qu’à récupérer la différence de taxation entre les deux pays, ce qui vous protège contre un impôt cumulé.

Afin de pouvoir actionner ce mécanisme d’imputation et éviter de payer deux fois, la traçabilité est essentielle. Vous devez conserver précieusement l’ensemble des justificatifs : l’attestation de l’impôt payé au Trésor espagnol, les documents de cession, et la preuve de la valeur des titres à la date de votre départ de France. Ces documents sont les preuves irréfutables que vous présenterez à l’administration française pour solder définitivement votre dette d’Exit Tax.

La cession hors UE : gare à la double imposition non compensée.

Le mécanisme d’imputation, si avantageux dans un pays de l’Union Européenne, devient un point de vigilance critique lorsque vous vous expatriez dans un État Tiers (hors UE/EEE). Si vous cédez vos titres après votre départ vers un pays n’ayant pas signé de convention fiscale adéquate avec la France – ou dont la convention n’est pas favorable – le risque d’une double imposition effective augmente considérablement.

En effet, la France est tenue d’accorder un crédit d’impôt uniquement si la convention le prévoit explicitement. Si l’imposition de la plus-value dans le pays d’accueil est inférieure à celle due au titre de l’Exit Tax française, vous devrez payer le différentiel à l’administration française, comme dans le cas de l’Espagne. Mais attention : si la convention ne permet pas l’imputation ou si la plus-value n’est pas imposée du tout dans le pays tiers, l’administration française pourrait remettre en cause l’intégralité du mécanisme. Dans le pire des cas, vous pourriez vous trouver à payer l’intégralité de la plus-value latente en France en plus de l’impôt potentiellement payé dans l’État Tiers, sans compensation totale. Choisir un pays hors UE/EEE, c’est donc prendre le risque de perdre cette garantie essentielle de neutralité fiscale lors de la revente de vos titres. Pour cela une analyse de la convention fiscale entre la France et le pays dans lequel vous entendez vous expatriez est primordial.

Alerte législative : anticipez le plf 2026 et l’alourdissement du dispositif

Le Projet de Loi de Finances (PLF) 2026 : un retour en arrière.

Vous l’aurez compris, le principal risque pour votre projet ne réside pas dans les règles actuelles, mais dans leur remise en cause imminente. Le Projet de Loi de Finances pour 2026 (PLF 2026), actuellement en discussion au Parlement, constitue une menace sérieuse pour la souplesse de l’Exit Tax. Des amendements, qui trouvent un écho favorable chez certains parlementaires, visent à purement et simplement abroger les assouplissements introduits en 2019. C’est un véritable signal politique envoyé aux entrepreneurs et hauts patrimoines : l’attractivité fiscale française pourrait céder le pas à une nouvelle fermeté.

Si cette proposition est maintenue dans le texte de loi promulgué fin 2025, le danger immédiat est le rétablissement d’une contrainte que l’on pensait révolue : le délai de conservation de quinze années. Ce changement de paradigme est brutal.

Vous ne devriez plus conserver vos titres pendant deux ou cinq ans, mais pendant quinze années entières pour obtenir le dégrèvement de l’Exit Tax. Ceci transforme une contrainte à moyen terme, aisément gérable dans votre planning d’expatriation, en un véritable fardeau patrimonial à long terme.

Pendant cette longue période, vous restez sous surveillance fiscale française, et votre capacité à vendre ou réorganiser votre patrimoine est fortement limitée. Cette nouvelle règle vous obligerait à revoir de fond en comble les stratégies de sortie de l’Exit Tax.

L’impact sur le calendrier : la confrontation entre la loi et le projet de vie.

La question centrale pour tout contribuable envisageant une expatriation est de savoir quelle loi lui sera applicable, et le facteur déterminant est la date de transfert effectif de domicile fiscal. Le calendrier législatif impose une urgence particulière : le régime actuel et favorable, offrant le dégrèvement en deux ou cinq ans, est celui de l’année 2025. Il s’appliquera uniquement aux départs réalisés avant le 1er janvier 2026.

Dès lors, l’entrepreneur est placé devant un dilemme stratégique. Soit il anticipe son départ fiscal pour qu’il soit effectif avant l’échéance du nouvel an, sécurisant ainsi les délais courts de dégrèvement. Soit il maintient son calendrier personnel au-delà de cette date, s’exposant alors à la Loi de Finances pour 2026 et, par conséquent, au risque majeur du délai de quinze ans.

En effet, lorsque le foyer familial (conjoint, enfants) et les intérêts économiques principaux restent momentanément en France, l’administration fiscale ne manquera pas de considérer que le contribuable reste, jusqu’au transfert réel de sa famille, un résident fiscal français.

La date de départ n’est pas une simple formalité administrative, mais la date de bascule entre deux régimes fiscaux radicalement différents, l’un gérable, l’autre contraignant sur le très long terme.

L’Exit Tax n’est pas un impôt que l’on peut ignorer ; elle est un dispositif redoutable, mais en l’état actuel de la loi, elle demeure gérable. La clé de votre succès réside dans votre capacité à respecter un calendrier législatif mouvant.

Le danger est clair : l’adoption du PLF 2026 et le retour probable au délai de quinze ans transforment une contrainte de moyen terme en un fardeau fiscal de très long terme. En l’espèce, vous devez considérer l’Exit Tax non pas comme une fatalité, mais comme un compte à rebours qui doit déterminer la date effective de votre bascule fiscale.

Pour tout entrepreneur, l’impératif est donc de ne jamais s’engager dans un processus d’expatriation sans avoir au préalable et de manière certaine validé la loi fiscale applicable à la date exacte du transfert de son domicile. La légalité du montage repose sur la cohérence entre votre foyer familial, vos intérêts économiques et votre déclaration de départ. Il est essentiel d’agir avec méthode et de consulter votre conseil juridique pour figer sans délai cette date de départ fiscal, afin de verrouiller les conditions de dégrèvement les plus favorables à la préservation de votre patrimoine.

En définitive, la complexité du droit fiscal, la rigueur de l’Exit Tax, et l’instabilité législative illustrée par le PLF 2026 ne sont pas des fins en soi. Elles sont des outils, ou dans ce cas précis, des contraintes, qui doivent être intégrées à une décision bien plus vaste : votre projet de vie personnel. L’optimisation fiscale, si elle est cruciale pour préserver votre patrimoine, ne devrait jamais dicter le bien-être familial ou le choix de votre nouveau foyer.

L’objectif de l’accompagnement juridique est précisément de mettre le droit fiscal, aussi technique soit-il, au service de vos aspirations personnelles. En clarifiant les risques (délai de 15 ans) et en sécurisant votre fenêtre de tir, nous transformons une incertitude en un plan d’action précis. Le véritable succès d’une expatriation réside dans l’harmonie entre une implantation familiale réussie à l’étranger et une fiscalité maîtrisée. Le respect strict des règles de dégrèvement n’est que le moyen d’assurer que, au final, c’est bien votre qualité de vie qui en sort gagnante.

Le Cabinet BUEDER AVOCAT est spécialisé dans l’accompagnement des entrepreneurs. Notre rôle est de vous aider à naviguer dans ces eaux complexes en transformant l’impératif législatif en une opportunité de planning précis. Nous vous assurons une feuille de route maîtrisée, garantissant la cohérence entre vos obligations fiscales, la restructuration de votre patrimoine et votre nouveau projet de vie à l’étranger.

Nous vous invitons à nous contacter pour évaluer sereinement votre situation. Ensemble, nous figerons la date de votre départ fiscal et validerons les démarches juridiques nécessaires pour vous assurer l’application des règles les plus favorables. Votre tranquillité d’esprit passe par un conseil éclairé.

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